Rencontre avec Răzvan et Irina…
Răzvan est compagnon dans notre centre résidentiel de Popești, et Irina est compagne à Iași. Tous deux se sont rendus, avec notre volontaire Leïla, dans la communauté Emmaüs de Satu Mare pour y passer une semaine, participer aux activités et observer le fonctionnement de cet “autre Emmaüs”.
Ils nous racontent leur séjour et nous parlent d’eux, de leur parcours avant Emmaüs.
Comment s’est passé votre séjour à Satu Mare ? Que pouvez vous dire à propos de l’organisation là-bas ?
Răzvan : La communauté Emmaüs de Satu Mare ne ressemble ni à Iași ni à Popești. Là-bas, c’est totalement différent. Par rapport à Popești, la grande différence c’est qu’ils sont en ville, et nous à la campagne. Cela compte beaucoup. Mais à Iași, qui est une ville, c’est également très différent par rapport à Satu Mare. Ça me plaît là-bas. Si je peux y retourner, j’y retournerai.
Irina : Ouah ! C’était très bien. Les compagnons, pareil. Les responsables, pareil. Il y a de la communication entre eux. Comment dire ? Travail travail (en français dans le texte).
Qu’est ce qui est différent ?
Irina : C’est un peu différent. Beaucoup, en fait. Par rapport aux compagnons, par exemple. Là-bas, c’est plus tranquille. Les relations dans le travail sont différentes.
Qu’est ce que tu as fait là-bas ?
Irina : J’aidais au stand de la vaisselle, à faire de la place pour mettre en rayon. Si je suis à la vaisselle, je sais comme arranger les produits. Là-bas c’est ça que je faisais. Voilà ! (en français dans le texte).
Quel a été votre moment préféré ?
Răzvan : Mon moment préféré à Satu Mare a été l’anniversaire de Paul, un compagnon. Il a fallu nous organiser un peu. Et j’ai participé à la préparation pour les gâteaux, les boissons, avec ceux qui étaient au magasin.
Je continue de parler avec les compagnons de Satu Mare, et ils me demandent « Quand est-ce que tu reviens ? Quand est-ce que tu reviens ? ».
Irina : J’ai beaucoup aimé le train. C’était tellement long ! On a passé beaucoup trop de temps dans le train. On en a eu trois. Et plusieurs fois je me suis dit « c’est bon, on est arrivés ». Mais non ! Une fois, on allait descendre. On est descendus avec les bagages. Et le contrôleur vient, il veut fermer la porte, tu sais ? J’ai appuyé, pour que ça ne se ferme pas. Il nous a dit : « Pourquoi vous descendez ? Ce n’est pas ici. Allez, remontez, il faut que vous descendiez plus tard ». Allez, on continue le voyage. On dort encore… et j’ai dit « bon, je crois que je vais y aller à pieds. Eux, ils y vont avec le train, et moi à pieds. Je me suis dit que je serais plus rapide qu’eux” (rires).
Răzvan, as-tu envie de parler de toi ?
Răzvan : Je suis né à Iași, j’ai passé beaucoup de temps dans une maison d’enfants. Avant de connaître Emmaüs, j’ai été dans un centre de placement jusqu’à 15 ans et demi. Ensuite, j’ai connu Laurențiu (qui est actuellement co-responsable de la communauté d’Emmaüs Iași, ndlr). Avant d’arriver à Emmaüs, il était assistant social dans la maison d’enfant où j’ai grandi. Il m’a beaucoup aidé là-bas. Plus tard, j’ai été dans un monastère pendant les vacances d’été et je l’ai rencontré de nouveau. Et, quand je lui ai raconté que je n’avais n’avais pas de travail ni d’endroit où aller, Laurențiu m’a proposé de venir à la fondation Emmaüs, parce qu’il fallait que je fasse ma rentrée et je n’avais aucune solution. C’était ma dernière année de lycée et je devais passer le baccalauréat. Je crois que cela a été une très bonne décision pour moi.
A Popești, je participe entre autres à la cuisine. Cela me plaît beaucoup.
Je suis très content d’avoir pu faire partie du projet de Satu Mare. Cela a été une très bonne expérience.
Tu étais déjà allé dans d’autres communautés Emmaüs en Roumanie ?
Răzvan : Non, seulement à Satu Mare. C’était la première fois. J’aimerais aller aussi à Târgu Jiu. Mais je ne sais pas qui de Popești ira. J’aimerais retourner à Satu Mare, par exemple pour un stage de un, deux, trois mois…
Et dans d’autres communautés d’Europe ?
Răzvan : J’ai déjà été au Salon Emmaüs Paris, deux semaines en 2013, mais je n’ai pas visité le pays. Ça m’a beaucoup plu. J’aime beaucoup quand les gens d’Emmaüs viennent à Popești. Par exemple, ceux que j’ai rencontrés à Paris, quand ils viennent chez nous, me demandent de traduire en français (Răzvan parle très bien français, ndlr).
Et où as-tu appris le français ?
Răzvan : J’ai suivi deux cours de français à l’Institut français, ici à Iași. Ensuite il a fallu que j’apprenne le français à l’école, parce que j’avais un examen de français au baccalauréat. Puis, à Emmaüs, j’ai fait des cours. J’ai eu une attestation, un diplôme.
Irina, as-tu envie de parler de toi ?
Irina : Je suis une vagabonde. Je ne me souviens pas combien de temps, mais j’ai vécu dans la rue. Quand j’ai terminé la 8e classe (14 ans), je suis allée en formation professionnelle. Puis je suis arrivée à Iași, à la gare. J’y suis restée. Le premier soir, la police m’a demandé d’où j’étais. J’ai dit que j’avais terminé l’école. « Tu n’as nulle part où aller ? Tu n’as pas de famille ? ». « J’ai une famille, mais elle ne m’a pas élevée. J’ai grandi à la maison d’enfants. »
Puis je suis restée dans le quartier de Târgu Cucu à Iași. J’y ai retrouvé des filles que je connaissais. Je m’ennuyais, je voulais faire quelque chose, trouver un travail, et du pain. J’ai été à la gare.
J’étais assez masculine. Une fois, je suis entrée dans un bar. J’ai demandé au barman si je pouvais aider à faire quelque chose, pour pouvoir manger. Et il a dit que oui. Il m’a posé des questions. Il croyait que j’étais un garçon, je lui ai dit « Non, je suis une fille. Je m’appelle Irina, et je vis dans la rue. ». Je dormais derrière la gare. Une dame m’a aidée, elle m’a apporté un matelas. J’ai travaillé dans un restaurant. J’ai beaucoup appris là-bas. J’ai appris le respect.
Comment as-tu connu Emmaüs ?
Irina : En 2001. Des personnes sont venues avec de la nourriture. On était tous à la gare. Ensuite, j’ai rencontré Gelu (co-responsable à la fondation, ndlr). Sa mère, sa famille, avaient préparé de la nourriture pour nous. La maison Horia (communauté actuelle, ndlr) n’existait pas encore. J’y suis venue en 2005.