Portrait du mois : Lila, volontaire à Emmaüs Satu Mare (avril 2022)

Sammy : Aujourd’hui pour cette interview, je reçois Lila de Satu Mare. Lila, je te laisse te présenter.

Lila :  Je m’appelle Lila Aubry, j’ai 21 ans, je suis en service civique à Satu Mare depuis huit mois bientôt. J’ai fait une licence de psychologie en sortant du bac et ensuite je me suis dirigée vers un service civique […]. Par la suite, je voudrais devenir éducatrice spécialisée.  

Est ce que tu pourrais me présenter Emmaüs Satu Mare ?

Emmaüs Satu Mare a pour objectif d’accompagner des jeunes de 18 à 30 ans dans leur insertion professionnelle et sociale, dans le but qu’ils soient autonomes et heureux dans leur vie. Les jeunes que l’on accueille viennent pour certains des centres de placement, d’autres ont été trouvés “dans la rue”[…]. Ils sont issus de familles défavorisées, ou ne sont jamais allés à l’école […]. Ils viennent pour travailler. […] En retour, ils ont un salaire et un accompagnement social. Ils sont vraiment volontaires, ils ont un entretien avant d’entrer. Ce n’est pas juste un centre d’hébergement. 

Peux-tu me présenter l’équipe ?

Il y a Jean-Philippe qui est président de l’association et qui s’occupe de la “paperasse”, des contacts avec Emmaüs Europe ou Emmaüs International. […]. Il est aussi trésorier d’Emmaüs Europe. […]. Ensuite […] il y a Sorin, qui est le directeur d’Emmaüs Satu Mare. Au quotidien, il gère les jeunes et a un rôle d’éducateur. Il coordonne aussi tous les salariés […]. Après, il y a la partie sociale, avec Manon, Viktoria et Dalma. Manon et Viktoria sont assistantes sociales. […] Toutes les 3 font des groupes de parole, […] avec les jeunes. Ça peut toucher la sexualité, les relations, le respect, la confiance en soi, la sécurité routière, le recyclage. […] Ces groupes de parole sont très importants […]. Elles s’occupent aussi de la partie santé, et font le lien avec la psychologue. Ensuite, il y a Monica qui est comptable et assistante de Jean-Philippe. […] Puis, on à Ivet, qui est responsable du dépôt et Simona qui est responsable du magasin. Elles s’occupent de faire tourner les deux établissements. On a Darian qui est chauffeur, qui transporte les jeunes quand il y a besoin, qui va faire des livraisons, qui va chercher des donations […]. On a aussi Maria qui travaille à la cuisine, qui est une ancienne jeune. Enfin, Iosif qui est responsable de la partie atelier au dépôt. […].

Et comment sont disposés vos différents lieux d’actions ?

Il y en a trois. Le magasin, plutôt en centre-ville, où il y a les bureaux, la cuisine . […]. On y retrouve un magasin de vaisselle, de jeux, d’objets de décor en tout genre, de vêtements, d’accessoires. […]. Et on est en train de réaménager une autre partie extérieure qui deviendra un potager, dans l’idée de faire pousser quelques légumes […] et de faire un endroit agréable où se poser […]. Il y a aussi la cuisine où tous les matins, le déjeuner est préparé […].  Ensuite, il y a la Mara, la maison où les jeunes habitent. Il y a environ 20 places. […]. A côté, il y a aussi une plus petite maison qui a 3 chambres, où vivent des jeunes qui sont dans l’idée d’une autonomie plus poussée […], pour ensuite prendre leur propre appartement. Viktoria, assistante sociale, est responsable de la Mara. Il y a toujours une personne disponible s’ils ont besoin […]. On a aussi un magasin de meubles avec un dépôt derrière. Les arrivages sont de France ou de Suisse.

Et toi personnellement, quelles sont tes activités ?

Je suis en mission de service civique avec Claire. Notre mission est d’accompagner les jeunes dans leurs quotidien […]. On peut être à la caisse, en cuisine, etc… […]. On propose des activités de loisirs en dehors du travail, […] aller au cinéma, jouer au football, se promener, aller à la piscine, faire des jeux de société, des jeux de rôle. 

Et qu’as-tu pensé d’Emmaüs Iasi, as-tu constaté des différences ou des points communs ?

Je suis très contente d’être venue ici. […]. Chez vous, les bureaux sont à la communauté, là où vivent les compagnons. Nous, ils sont au magasin. Et a contrario chez vous ils mangent à la communauté et nous au magasin. Il y a des différences au niveau de l’organisation des équipes. Il y a Jean-Philippe et Sorin qui tiennent l’asso et qui prennent les décisions les plus importantes. Ils ont la même volonté pour l’association et pour les jeunes. […]. Et après, même en tant que volontaires ou salariés de l’association, on est sollicités pour donner nos avis sur le comportement de tel ou tel jeune. On a une réunion tous ensemble le vendredi pour discuter de cela […]. On est bien plus axé, je pense, sur le caractère social de l’association. Elle a pour but en fait d’élever les jeunes au maximum de leurs capacités et au niveau social de tout un chacun. […]. Chaque membre de l’équipe à cette motivation-là, […] les reprendre à chaque fois que quelque chose n’est pas bien fait ou s’ils ne sont pas respectueux ou envers les autres. […]. il y a quelques jeunes sur lesquels ça ne fonctionne pas […] du coup ils partent en étant accompagnés bien évidemment. Les points communs c’est l’accompagnement de personnes en difficulté sociale, qui ont a priori un handicap mental plus ou moins fort, qui se sont retrouvés dans une situation pas facile. Ils n’ont pas de personnes autres qui peuvent les accompagner au sein de leur famille.

Y-a-t-il un moment qui t’a marqué pendant ton service civique ? 

Lors de l’anniversaire de Dany, j’étais de service à la Mara. Il voulait le fêter avec ses copains de la Mara et un autre copain qui a 17 ans et qui est dans un centre de placement appelé “casa de copii” mais qui vient travailler au magasin avec nous. On est allé le chercher dans le centre où il habite. Sur le chemin du retour […], on croise deux autres jeunes garçons. Et là, une bagarre commence. Dany se prend un poing dans la figure, et tombe à terre. Je commence à dire “stop stop”, aucune réaction. Ensuite, il a failli se prendre un coup de pied dans les côtes. Là, je m’interpose et je dis “gata gata” (c’est bon, c’est bon, ndlr). Ils arrêtent. Dans tous les cas, il y a un jeune qui se fait frapper devant moi et devant les autres. Ça m’a choquée. Je n’avais jamais vu un acte de violence de cette manière de mes propres yeux. C’était au début de mon service civique, je me suis demandé si ça allait recommencer. J’étais choquée, mais c’est pas pour autant que j’ai voulu arrêter ou que je me suis sentie en insécurité les jours suivants. Ça m’apprend aussi la vie et ce qui peut arriver certaines fois, comment réagir, comment gérer ça aussi par moi-même plus tard. 

Et un moment positif ? 

Une fois, on avait proposé d’aller à la patinoire de Satu Mare avec les jeunes. Il y avait un jeune qui ne voulait pas trop y aller parce qu’il ne savait pas patiner. On a insisté […] et il est venu. Il a posé ses pieds sur la glace. Au début, il fallait qu’on soit deux à le “porter” pour qu’il avance. Et au bout de trois heures, il y arrivait. Il voulait même faire quelques pas tout seul. C’est un petit plaisir pour nous et un grand pour lui, il nous a bien remercié.

Je te remercie de m’avoir accordé cette interview et bonne continuation 

De rien, merci à toi